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Par Jacinthe Laforest / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne – ATL
Jean-Paul Arsenault, président de la Commission sur les forêts.

La Commission sur les forêts (PEI Forest Commission), présidée par Jean-Paul Arsenault, a comparu jeudi dernier devant le Comité permanent de l’Assemblée législative sur les ressources naturelles et l’environnement durable.  La conclusion qui se dégage de cette présentation est formelle : l’Île a abandonné ses forêts.  

De 2001 à 2022, la province a graduellement diminué son financement pour l’aménagement forestier.  Pour Jean-Paul Arsenault, président de la Commission provinciale sur les forêts, c’est un autre signe que le gouvernement provincial abandonne ses forêts à une période où, au contraire, elles prennent une importance cruciale, ne serait-ce que dans la gestion du carbone.  

«Les chiffres qu’on nous a fournis proviennent des comptes publics.  Nous avons utilisé la méthode de la Banque du Canada pour tenir compte de l’inflation», a précisé Jean-Paul Arsenault.  Le tableau qu’il a soumis aux membres du Comité permanent de l’Assemblée législative sur les ressources naturelles et l’environnement durable montre que le financement a plafonné à environ 1,4 million de dollars par année de 2001 à 2010 et qu’il n’a cessé de diminuer depuis, se fixant à environ 800 000 $ en 2022.  

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Keila Miller, membre de la Commission sur les forêts et coordonatrice d’une des 25 associations d’aménagement de bassin versant de la province.

Utilisant la même méthode pour transformer de l’argent de 1985 en valeur actuelle, la Commission suggère qu’au milieu des années 1980, les subventions avaient une valeur de 2,4 millions de dollars.  La différence est notable.  «Une des raisons de cette diminution est la perte du financement fédéral, à partir de 1993. Cependant, la province a elle aussi coupé ses budgets», précise le président de la Commission sur les forêts.  

Bois franc en grande demande

Jean-Paul Arsenault exhorte le gouvernement provincial à suivre sa propre politique forestière, qui est en vigueur depuis 2006.  Dans cette politique, le gouvernement annonce son intention de favoriser la croissance d’essence de bois franc en pépinière, afin de diversifier les forêts et les rendre plus résilientes.  

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Matt Hughes, membre de la Commission sur les forêts de l’ÎPÉ, est aussi entrepreneur forestier

«Nous n’avons vu aucun indice que les choses avaient pris un virage dans cette direction.  Les chiffres que nous avons obtenus disent que 82 % des investissements vont du côté des bois mous et seulement 4 %, du côté des essences de bois franc.  Au début de notre mandat [de la Commission sur les forêts] nous sommes allés sur le terrain pour parler aux propriétaires de lots boisés, aux contracteurs et techniciens et tous nous ont dit qu’ils ont besoin de plus de bois franc.  Là où ils auraient besoin de milliers de jeunes arbres, on leur en offre 200.  Ça n’est pas comme ça qu’on va créer des forêts plus résilientes», s’indigne Jean-Paul Arsenault.  

Selon lui, l’engagement du gouvernement provincial de planter 300 000 arbres dans le cadre du programme fédéral de 2 milliards d’arbres d’ici 2030 ne résout rien, car encore une fois, les pousses de bois tendre, les résineux, seront privilégiées.  

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Al Perry, chef libéral par intérim et membre du Comité permanent de l’Assemblée législative sur les ressources naturelles et l’environnement durable.

Industrie forestière laissée à elle-même

Les entrepreneurs forestiers sont des gens que Jean-Paul Arsenault décrit comme «férocement indépendants».  D’une certaine façon, ça fait leur affaire que la province ne se mêle pas trop de leurs affaires.  Cependant, il doit y avoir une sorte de communication, ne serait-ce que pour leur garantir un gagne-pain à long terme.  

«Une des premières questions que j’ai posées comme président de la Commission concernait les données sur l’industrie forestière.  Qui en fait partie, en quoi consiste-t-elle,  quelle est sa contribution au produit intérieur brut?  On m’a dit que ces données n’existaient pas car personne n’avait la responsabilité de les collecter.»

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Zack Bell, député de de Charlottetown-Winsloe et membre du Comité permanent de l’Assemblée législative sur les ressources naturelles et l’environnement durable.

Aussitôt, le président de la Commission a exigé que des données soient recueillies et c’est à la suite de ses démarches que le gouvernement a annoncé récemment une sorte de recensement de l’industrie forestière.  

«Les données de Statistique Canada estiment la valeur de l’industrie forestière à l’Île à 4 millions de dollars.  Nous avons fait des calculs rapides et avons constaté que les contrats de chauffages en biomasse valaient à eux seuls plus que ça.  C’est clair qu’on n’a pas une idée claire de la valeur monétaire de cette industrie», a martelé Jean-Paul Arsenault.  

Le manque d’information sur la valeur de l’industrie rend hasardeuse toute estimation des pertes subies par les propriétaires de lots boisés et les opérateurs forestiers, en raison de Fiona.  

Jean-Paul Arsenault nuance également ce qui peut constituer ou non une perte.  En matière de foresteries, tous n’ont pas la même vision de ce qui est perdu ou gaspillé.  Ce ne sont pas tous les propriétaires qui veulent faire de l’argent avec leur forêt et, en aucun cas, cela ne devrait les priver d’accéder à un soutien pour aménager leur lot et en faire un milieu résilient, diversifié, qui a sa propre valeur incalculable en argent.  

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